Combien de chaussures mettre dans sa valise ?

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Exemple de questions existentielles : dois-je emporter mes compensées super belles, super chères qui me rendront inoubliable sur les photos et m’assureront l’admiration de générations et de générations mais qui, à elles-seules, prennent la place de 10 paires de nu-pieds ?

10 questions fondamentales que l’on doit se poser avant de partir en vacances (et des éléments de réponses certifiés non-conformes)

1/ Combien de nu-pieds de plage dois-je emporter ? (des noirs Ancient Greek Sandal, c’est sûr) (des dorés K Jacques, c’est sûr aussi) (si je les aplatis bien, ça ne prendra pas de places) (le problème c’est que je me suis déjà dit ça avec les 49 t-shirts)

2/ Est-ce vraiment honnête de prendre mes runnings ?

3/ Si j’ai mes runnings, dois-je prendre une paire de tennis en toile? (genre des Superga)

4/ Et donc ai-je besoin d’espadrilles ? (ne serait-ce pas double emploi ?) (en même temps ce n’est pas du tout le même style) (je les achèterai là-bas) (en fait)

5/ Quid de ces jolis mocassins en peau esprit Pocahontas ? (les Minnetonka reviennent l’hiver prochain, ne devrais-je pas prendre de l’avance?) (je serai super pointue fashion toutes les vacances) (j’parie un sein que je ne les mettrai pas)

6/ Est-ce que je prends des talons hauts ? (après tout, pour faire des barbeucs sur la plage, ça ne sert à rien) (je les emporte toujours et je ne les mets jamais) (c’est justement l’année où je vais en avoir besoin) (si jamais je ne les ai pas, je vais les regretter) (je vais en prendre des dorées, ça va avec tout) (mais est-ce que j’en ai??) (zut, faut que je cours chez Minelli)

7/ Est-ce que j’emporte les méduses en cuir fashion qui était fashion l’année dernière ? (au moins elles ne craignent rien, elles sont déjà un peu usées) (au cas où je fais une activité à haut risque shoesesque) (allez je les prends, ça ne change pas grand chose) (ou alors je les donnerai à une copine!) (oui je vais faire ça)

8/ Han, zut, et les tongs ? (des très colorées ou des noires über chics) (bon en vrai, j’aime pas les tongs, ça me fait mal entre les doigts de pieds, mais autour d’une piscine, ou, euh, au camping, ou le temps de faire une pose de vernis?) (non non j’en prends pas) (enfin si, je les laisserai là-bas au pire) (raaa, bon. Je déciderai plus tard)

9/ Du coup, ça me fait une paire en moins, j’aurais donc la place pour une paire de nu-pieds à bijoux ? (c’est pas raisonnableu) (s’il y a une soirée chic sur la plage?) (ou pour le mariage de Nico et Caro?)

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10/ Et la question la plus chaude de l’été : dois-je prendre mes sublimes compensées ultra belles, ultra chères, qui me rendraient inoubliables sur les photos pendant des générations et des générations (« et ça, c’est grand mère Mathilde en 2015, quel personnage, regarde comment elle était habillée, quelle élégaaaaance »)  mais prennent autant de place que toutes les autres paires réunies dans ma valise ?

Et la question bonus : Dois-je prendre des chaînes de cheville ? (j’ai LU que ça revenait) (si si) (de toutes façons j’ai toujours aimé ça, c’est bohème) (menteeeeeuse)

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Allez ! Bonnes vacances ! (enfin, je n’ai pas dit mon dernier mot) (cette semaine, une petite « tendance de la semaine » spécial ce qu’on va kiffer à la rentrée héhé)



Des femmes et des chaussures

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J’ai un tas monstrueux de trucs à vous dire et à vous montrer sur les chaussures (interviews, concours, séries photos) mais comme vous avez commencé à le comprendre, je fais tout un bric-à-brac de trucs pendant la journée et ce mois de juillet nous tient un peu éloignées. Bref, je ne vais pas vous la faire en trois langues mais je ne suis pas partie, je suis bien là, je suis ailleurs, c’est tout (ahah elle est tellement drôle la docteresse). Mais quand même ! Je me suis retenue de vous parler de la crise grecque, je ne peux pas me retenir de vous parler de ces images. En ce moment, je suis assez emballée par les prises de position des stars américaines, il y a un vrai courant de conscience sur l’inégalité homme-femme. Comme le #AskHerMore de Reese Witherspoon ou le #HeForShe d’Emma Watson (googlez héhé).

À propos de la délicate affaire de défendre les droits et images des femmes quand et surtout QUAND on en est une, justement. Plus suspect que le mâle qui hurle à l’inégalité des sexes (même si on n’est pas contre hein), la personne de sexe féminin qui s’interroge sur la représentation des seins, des entre-jambes, des os, des regards langoureux et des chattes dans la société. Personnellement, je suis à prendre avec des pincettes car je déteste qu’on me remise dans un enclos pour cause de fente au zizi. J’adore être une femme mais je ne vois pas en quoi ça devrait m’obliger à tenir un discours en particulier ou à  accomplir certaines tâches plus que d’autres (suivez mon regard).

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Aujourd’hui, je reçois ces images de la nouvelle campagne automne-hiver 2015 de la créatrice de chaussures Amélie Pichard. Je l’aime beaucoup en tant que personne. J’aime ses créations, me réjouit que ça commence à bouillonner pour elle outre-atlantique, j’adore son imagerie (découvrez son tumblr) qu’il faut appréhender avec un second degré. À l’instar de cette singulière série d’images, charnelle et carrossée. Ce qui retient mon attention ? C’est une sexualité de garçon (le t-shirt mouillé s’il vous plaît!) qui s’exprime par les yeux d’une fille. Les codes de la femme-objet des vieux Playboy des années 60, à mi-chemin entre le consentement et la naïveté, s’effacent au profit d’une femme au second degré affirmé. Une femme qui s’amuse de la mascarade féminine (la perruque blonde délibérément mal positionnée). Le désir du garçon est absorbé, digéré et recraché par les yeux d’une femme, Amélie, jeune et jolie, hétérosexuelle avec une vie tout ce qu’il y a de plus normale (enfin entre guillemets), des chats à la maison et un métier de prof.

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Ces images nécessitent un second degré pour être lues, certes. Si elles étaient conçues par un homme, nous crierions au scandale. Elles ne sont pas dénuées d’une légère prise de risque pour Amélie d’une part et ses congénères du même sexe de l’autre (Amélie taxée d’obsédée, le reste des femmes de poupées gonflables sans âme – enfin je ne vais pas vous faire un dessin – si elles tombaient entre les mains de neuneus). Et comme pour un film qui nécessite des lunettes spéciales 3D, cette série demande des binocles  « second degré » au risque de percevoir des femmes une image plate, sans relief, en un mot, potich’sexe.

MAIS, trêve de plaisanterie, la morale de la morale de cette histoire est quand même la suivante : en vrai de vrai, Amélie met le doigt sur une vérité absolue et absolument pas assez dite. Nous les filles, on kiffe aussi les gros nénés.

Yep.

By the way : j’ai un gros gros faible pour les bottines lacées en python et les santiags plates ci-dessous (inspirées de Nicolas Cage dans Saylor et Lula me glisse-t-on!). À tenter ?

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 Photographies : Nicolas Coulomb.



Jouer son image aux dés.

 

Photo Marie Florès pour Shooooes

Photo Marie Florès pour Shooooes

Avant, on jouait un peu son image aux dés. Posant le temps d’un instant avec l’espoir un peu fou qu’on serait beau sur la photo. Les photogéniques étant les borgnes au royaume des aveugles.

Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux, et ça ne cesse de me perturber, me titiller les méninges, m’exaspérer, on ne dit plus des choses DE soi – des gestes, des mots, des traits qu’on laisse échapper et qui offrent aux autres le bonheur de nous saisir dans ces fulgurances – on dit des choses SUR soi. Tout est contrôlé, maîtrisé, réfléchi et rien, ou peu, ne transparaît de notre vérité. L’autre nous montre ce qu’il pense être le meilleur de lui pour… qu’on l’aime.

Tout cela demeure une vaste quête d’amour. Qui m’interroge. On n’a jamais rien construit d’aussi efficace pour avoir le sentiment d’être aimé que les Likes, n’est-ce pas ? Ce serait comme des shoots : en quelques minutes, vous avez votre dose, qui peut se renouveler plusieurs fois par jour (d’ailleurs d’ici peu, on assistera sans doute aux premiers cas de malades, comme pour les jeux d’argent ou vidéos). J’ai toujours eu peur des drogues, de la transformation qu’elle pouvait imposer à mon cerveau. Et celle-là me fait trembler, je la sens qui s’insinue dans des moments de pures réalités où je suis clairement dans un présent épanouissant (à la campagne avec les enfants : « tiens et si je prenais une photo de ce bébé poney de 1 mois, ça va liker »), je la sens qui cherche à imposer elle-même son rythme avide de régularité, de toujours plus plus plus. S’en éloigner ? Ce serait comme de dire en 1975, alors même que vous avez décidé de construire vos projets « non, je ne prendrai pas le téléphone ». Et pourtant, une partie de moi se passerait bien de la gachette à Likes. Trop déstabilisant pour un petit chat sauvage comme moi qui se méfie des miroirs aux alouettes.

Comment rester proche de soi, entier, avec un média qui vous pousse à vous mettre en scène ? Et donc, à jouer un rôle ? Je ne cesse d’y réfléchir. Je trouve cela passionnant (et peut-être que je vous barde atrocement).  Même s’il faut encore et encore se poser, ne pas se laisser imposer de modèles, ne pas chercher à bâtir une maison qui ne serait pas la nôtre, réussir à s’extraire pour trouver à respirer son propre air, remettre encore son identité sur la table pour la regarder et la questionner.

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Sur cette photo de Marie Florès, voici l’un des plus extraordinaires modèles de la saison printemps-été 2015 : les sandales slimesques de Sergio Rossi en cuir velours vert mais vert-vert hein. Je les ai vues au Bon Marché à Paris pour celles à qui ça fait des grelots dans l’estomac !


 
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